On est quel jour ? #37

Comme je dis souvent « je suis né l’année où l’homme a marché sur la lune, aujourd’hui, moi, j’apprends à marcher sur terre ». « Comme ma mère ! » répond la jeune kiné de Timonie. Elle (sa mère) est née en 1969, le 22 juillet (moi le 22 aout de la même année).

Je traverse la Timonie et me voilà sur l’ile indépendante de « I Hu aÏ ». Ici, l’infirmier me dit : « on a un point commun ». Ah bon. Lequel ? « On est nés le même jour… mais pas la même année »… Petit con.

Demain, peut-être, mercredi peut-être... je devrais quitter cette ile pour rejoindre la Bourbonnie. Mais auparavant, je lance ce lundi, une grande enquête d’investigation sur le prix du café au distributeur automatique.

Pour cela je dois donc, en toute transparence citer les noms, enfin le nom d’une entreprise, basée à Gardanne qui propose des machines automatiques de distribution de café.

Et dont le petit « noir » est très cher en fonction des lieux d’implantation.

J’ai le vertige.

Après 4 années de souffrance de la jambe 24H/24, la douleur est fortement présente dans mon corps depuis quelques jours.

Attention, je ne veux en aucun cas comparer mes douleurs avec celles des autres, d’où ‘l’invention de cette fameuse échelle de la douleur « entre 0 et 10, quelle note donnez-vous à Votre Douleur ? »

Je comprends mieux, désormais, ce que cette sensation douloureuse représente pour chacun, et la manière de l’affronter. Reste qu’une douleur physique, 24h/24 devient psychologique. J’ai passé 4 ans avec mes cannes, béquilles, fauteuils, déambulateurs …

J’ai passé 4 ans à mal dormir,

J’ai passé 4 ans à chercher ma canne pour pouvoir aller pisser, pour aller me laver les mains, pour me faire un café ou cuire un oeuf.

4 ans à éviter de faire tomber quelque chose par terre car je ne peux pas le ramasser…

4 ans de difficultés à monter dans une voiture, à éviter les transports en commun…

4 ans où lorsqu’une douleur s’estompe, une autre arrive…

4 ans qui me font que mes 4 opérations (dos + hanche) cachaient de terribles conclusions pour moi… et pour ma vie…

Y a pire et je l’ai trop constaté de mes yeux vu, mais il semble, malgré le soin et la bienveillance du personnel hospitalier qui est remarquable, que l’on ait oublié les personnes différentes dans les plus petits détails de la vie :

Pourquoi les distributeurs de boissons sont aussi bas pour retirer votre produit ?

Pourquoi les portes, même dans les étalements hospitaliers, sont si lourdes ?

Pourquoi n’y a-t-il plus de bancs publics ?

Pourquoi n’a-t-on pas imaginer un parapluie pour handicapé qui ne fasse pas robot médical, mais qui soit utile pour ceux qui n’ont qu’une main voire aucune, car amputées ou accaparées par les deux béquilles.

Les « pourquoi » sont nombreux et ils contribuent à amplifier cette douloureuse douleur quotidienne.

Avec ma copine espagnole Dolorès (« douleur » en espagnol) qui aurait pu être amie avec Consuelo.a (Consolation) mais Consuelo était le prénom de ma mère qui m’a dit qu’elle ne connaissait pas Dolorès.

J’espère que de la-haut elle ne me l’a pas envoyé pour faire connaissance ?

À moins de faire de Dolores… ma meilleure amie…

Mais elle ne passera jamais devant mes vrais meilleurs amis de Bédoulie qui m’ont sauvé la vie.

Consuelo, ma mère, que mon père appelait « Chéllo » allait la messe tous les dimanches matins. Mon père allait lui au bistrot pour jouer à la belote et s’en jeter quelques uns derrière la cravate qu’il n’a jamais porté d’ailleurs.

Ma mère vivait dans la douleur morale (et certainement aussi physique) « mais il fallait souffrir pour aimer - et être aimé - par le bon Dieu ». Je pense qu’il m’en reste quelque chose, moi, qui, dans ma vie d’avant, avait peur de tout. Un exemple ? À l’école primaire, lorsque l’instituteur me demandait de lire à haute voix, devant toute la classe. J’étais tétanisé. Aujourd’hui c’est mon métier dans les radios ou TV où j’officie.

Dolorès, ma meilleure amie me rappelle d’ailleurs que chaque douleur a été un rebond pour moi.

Je vous disais avoir le vertige car pour reprendre A. Malraux : « Toute douleur qui n’aide personne est absurde »

Alors, oui. D’une part, j’en ai parlé à Dolorès, la douleur m’a aidé à changer mon regard sur les autres et sur ceux qui nous entourent. Ma douleur est passage obligé pour renaitre (mais en quoi ?).

Ma douleur m'a aidé et marque aujourd'hui, en tout cas, une nouvelle étape dans ma vie…

Et si la « douleur est le terreau de l’artiste » comme le disait Dalida, je vais devenir « créatif ».

Demain ou après-demain, mon amie ange gardien, Dolorès devrait me quitter, elle en a parlé à sa cops Morphine.

Dolores avait une mission passagère et je pourrais dire comme Renoir « la douleur passe, la beauté reste ».

Créatif, beau et intelligent aussi ? Ma nouvelle vie commence à me plaire. Je commence pas où ?

Spinoza a une réponse interessante : « si vous voulez que la vie vous sourie, apportez-lui d’abord votre bonne humeur ».

C’est fou comme l’écriture a un effet cathartique surprenant ?

Le samedi soir, que se soit en Bourbonnie ou ici à l’I Hu aï, les patients regardent soit la Star Academy, soit Columbo… Et Columbo c’est bien.

Mais, vous voyez, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond.

«C’est fou ce qu’un détail peut avoir son importance quand on s’y attache» dirait Columbo. Je me le suis dit aussi…

J’ai pris plusieurs cafés au distributeur automatique de la clinique Provence - Bourbonne au prix de 1,20 euros le café.

J’ai pris, le même café expresso au distributeur automatique de l’IHU de Marseille au prix de 0,60 euros.

Juste une dernière chose : les deux distributeurs appartiennent à la même société Maxicoffee. Pourquoi cette différence ?

Dès lundi, j’ouvre l’enquête.

« Quand je vais dire ça à ma femme. »

La suite au prochain épisode.

Vous avez vu dans le ciel : les planètes sont alignées avec la Lune.

J’ai appelé la lune hier.

Elle m’a dit : « les planètes sont alignées, profite bien des débuts de ta nouvelle vie »

Bon lundi.