On est quel jour ? #44
« Bonjou » FAB n’aime pas dire Bonjour et aime encore moins la lettre « R ».
Non seulement, il est impoli, grossier et, en plus, ne s’est pas parlé, quand il parle.
NICO, lui, aboie et sourit chaque fois que JOR dit « on s’en bat les c….s »
POLO, rit et dit bonjour à sa façon : « tu as de gros nichons ce matin ». Puis il s’endort. En fait, il est réveillé 17 mn par jour.
Pendant ce temps, le maniaque de GEGE nettoie la terrasse en fredonnant sa chanson du jour, aujourd’hui : « le petit bonhomme en mousse ».
ALX, le rugbyman-comptable rêve d’arrêter un bus avec sa tête, en prenant les deux rétroviseurs du véhicule pour les cornes d’un taureau sévèrement burné.
MIK semble plus posé, mais il faut toujours se méfier de l’eau qui dort. Toutefois, le dos de ce carreleur l’a mis sur le carreau.
La discussion improbable.
FAB tu regardes quoi sur ton téléphone ? (Pour une meilleure lecture : R = _)
=> Je egade un film d’ho__eu_, qui fait peu_ pou_ de v_ai. C’est ae. Tu vois, lui, l’acteu_ est tombé dans un t_ou. Et tout le suspense est là. On di_ait qu’il ne se passe _ien ? Mais tu ve__ais. Ça s’appelle : « De_nie_ _ound dans l’o__ifice »
NICO arrête de fumer les mégots du cendrier. Tu veux une clope ?
=> Ouaf répond-il.
POLO dort
ALX se souvient mélancolique du recollage de son crâne, JOR ne veut plus prendre le train depuis qu’il se l’est pris en pleine gueule.
MIK : « tu aimes bien te faire du mal ? »
JOR : « qu’est-ce que tu veux dire ? Moi je m’en bats les c….s »
GEGE nous ressort une vieille blague :
C'est l'histoire d'un mec qui rentre dans un bar
– je voudrais 2 bières s’il vous plait
– des pressions ?
– non, alcoolisme
Et il ajoute : « je vais pisser, j'ai toujours envie d'aller pisser lorsque je suis ici »
ALX : « Tu n’as qu’à pisser dans le trou ? »
FAB : « Tu pa_les de quel t_ou ? »
GEGE ne pisse pas loin en fait.
POLO dort
NAPO : Tu pourrais me dépanner d’une clope ? J’en ai plus.
NAPO a l’art de mettre en avant un début de phrase positive mais il conclue toujours son propos par une plainte : "ma femme m'a donné 4 clopes hier. Mais je les ai fumé en 4 heures. j'en ai plus."
« Hier j’ai bien mangé, mais c’était froid ». « On est bien soigné ici, mais l’autre jour, ils m'ont réveillé trop tôt pour rien, les médicaments peuvent attendre » et même "il fait beau, mais il va pleuvoir"
Bref, ainsi va la vie dans le roof-top de Bourbonnie dont la porte automatique d’entrée ou de sortie a décidé de choisir « qui sort »… Elle s’ouvre ou elle ne s’ouvre pas ?
GREG, THIB ET FIFI sont déjà partis, mais cela ne signifie pas pour autant qu’ils sont moins cons.
Et vous voulez sortir d'ici indemne ?
Dans ce flot de paroles intéressantes, il faut bien avouer que l’ambiance, le dialogue, l’humour font partie de notre thérapie. Rester seul dans son coin est mortifère.
C’est peut-être une leçon à tirer : « ne marchez jamais seul » on a tous, finalement, besoin l’un de l’autre.
Ici, pour le 50e jour (voire plus) je viens de me faire « piquer » une nouvelle fois la jambe droite. Elle ressemble à une passoire.
Cette terrible seringue du soir pour éviter de choper la phlébite. C’est le lot pour celles et ceux qui ne marchent pratiquement plus.
De mon coté, j’ai choisi le fauteuil roulant, tôt le matin et le soir. Le reste de la journée je gambade avec deux béquilles.
En attendant que je retrouve mon équilibre debout car si je marche sans béquille, je ressemble à Culbuto qui a bercé notre enfance.
Dans la salle de kiné, chaque visage de patient cache une histoire humaine qui a morflé. Certains font le choix d’accentuer cet accident de vie, ils font une de ces gueules.
Peut-être ont-ils mal ? On a tous mal ici.
Moi, j’ai encore du chemin à parcourir avant de distinguer une lueur de lumière vers la sortie, au printemps prochain.
Alors que deux autres batards se barrent demain.
GEGE et MIK
Enculés !
(Vivement que ce soit mon tour)
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